Les paravents de Piero Fornasetti

catherine auguste
par Catherine Auguste
ancienne élève
des Beaux-Arts de Paris
designe et décore des cabinets de curiosités

« Ce que je cherche dans chaque objet est la marque de l’homme » dit Fornasetti.

Fornasetti : peintre, sculpteur, décorateur d’intérieur, graveur, il a réalisé plus de 11 000 décors et costumes, organisé de nombreuses expositions et événements dans le monde entier. Son imagination héritée d’une forte culture italienne se répand sur tous les supports possibles : cravates, gilets, verres, assiettes, parapluie, lampes, meubles, paravents…C’est là que son sens de l’humour, sa marque d’homme, s’exprime.

 

 

 

Importance de l’architecture dans l’oeuvre de Fornasetti

 

L’œuvre décorative de Piero Fornasetti est totalement imprégnée d’architecture qui est sans aucun doute un des trésors de l’Italie. Bien que ses motifs soient empruntés à Palladio, Bramante, Brunelleschi ou Piranèse, il développe un style méditerranéen, italianisant qui lui est propre. Il force les plans, les élévations ou les bâtiments à épouser les formes de ses supports : vêtements, meubles, lampes… Il propose des versions personnelles des fresques néo-classiques de Pompéi où la répétition des motifs comme une frise incessante semble indomptable.

Pendant les années 50, Rome constitue une source d’inspiration constante. Les façades, les ruines sont vues avec un œil de romantique du XVIIIe siècle et non comme un archéologue. La mise en scène poétique l’emporte sur la simple expression du passé monumental.

Pour Fornasetti, comme pour le designer Gio Ponti avec qui il travaillera des années, l’architecture amène le mouvement. On s’y promène, on ouvre des portes, on monte des escaliers, des lumières se diffusent. On avance dans un château enchanté selon l’analyse de Patrick Mauriès (auteur de l’ouvrage sur Fornasetti). Ainsi, l’architecture présente une succession de points de vue. Et la question « qu’y a-t-il derrière ? » est toujours posée.

La corrélation entre l’architecture et le meuble restera fascinante pour Fornasetti : portes, façades, délimitation d’espaces intérieurs entrent dans ces deux formes. Cela explique en partie la production de ses paravents, mobilier mobile et à facettes.

 

Les variations et les thèmes de trompe l’oeil

 

Au-delà de sa collaboration avec Gio Ponti qui sans aucun doute l’aura révélé, Fornasetti dirige personnellement son travail créatif vers la magie et l’illusion. Il se réfère souvent aux maîtres du trompe l’œil de la Renaissance en déroutant les modèles ici piochés : l’image d’un dôme décore le fond d’un bol, le Colisée devient théière… : l’illusion enrobe la fonction. L’œil est trompé et en cela il perpétue la tradition italienne.

Pour Fornasetti, un seul objet ne peut offrir toutes les facettes d’une idée. Il prend plaisir à laisser dériver son imagination. Un thème se décline dans des formes multiples mais aussi sur des supports multiples. L’exemple le plus marquant de ces Thèmes et Variations est incontestablement le visage de cette courtisane tiré d’un magazine français du XIX° siècle et qu’il modula en plus de 500 variations essentiellement pour la vaisselle.

Parmi ses thèmes favoris : le soleil, les jeux de cartes, Arlequin et les décors de la comedia dell’arte, les instruments de musique (particulièrement présents dans les intarsia de la Renaissance) ou ce visage de femme que certains ont suggéré être la Mona Lisa de Fornasetti. Toutes ses déclinaisons peuvent perçues comme des calembours à première vue. Mais il faut voir au-delà une œuvre créative pleine de joie et jamais lassée de la vie.

Fornasetti aujourd’hui

 

Aujourd’hui, son fils Barnaba Fornasetti continue l’œuvre en reproduisant des modèles de son père et les siens propres. Tout est exécuté à la main, les couleurs sont reproduites par un peintre qui copie rigoureusement les modèles originaux. Seule la technique de lithographie a été remplacée par celle de la sérigraphie pour la reproduction finale. Pour le mobilier, le décor est reporté sur des surfaces laquées qui sont ensuite vernies pour s’assurer d’une surface parfaitement unie.


Paravent Pompéi

Fornasetti a beaucoup joué avec les fresques de Pompéi sur divers supports (encoignures, pots…). Ce paravent est fortement imprégné par les fresques de Pompéi mais ici les motifs sont réinterprétés et reproductibles à l’infini comme une frise.


Paravent fragments romains

« Fragments romains », paravent inspiré par certains immeubles de Rome comme la Maison de Rienzi où des sculptures antiques sont prises dans les murs. Ce paravent exprime bien l’idée de la « marque de l’homme » chère à Fornasetti.


Paravent armoire d'un gentleman

Paravent sur roulettes qui semble ouvrir une armoire révélant la vie sportive d’un gentleman : bottes de cheval, fusils de chasse, clubs de golf, canne à pêche, diverses casquettes et cravates, celles du parfait gentleman. Le trompe l’œil ne s’arrête pas là : les tiroirs représentés sont à peine ouverts, il peut y avoir encore autre chose.


Paravent avec acrobates

Acrobat, paravent de 1952 qui a été décliné en deux couleurs de fond : la noire comme celle-ci et une blanche.

 

Biographie

 

1913 naissance le 10 novembre à Milan de Piero Fornasetti
1930 entre à l’Académie Brera pour apprendre le dessin, est expulse en 1932 pour indiscipline
1933 expose ses premiers foulards de soie imprimée à la triennale de Milan
1935 à la sixième triennale présente entre autres choses une frise décorative en céramique reprenant le style archaïque
1940 rencontre avec Gio Ponti, architecte et designer avec lequel il travaillera des années
1942 exécute des fresques pour le Palais Bo de Padoue
1943-1946 pendant la guerre s’exile en Suisse
1947 expose toujours à la Triennale de Milan une série de motifs pour céramiques (commandée par Gio Ponti).
1950 réalise l’intérieur du Casino de San Remo
1951 chargé de l’ameublement de la Maison Lucano, un des premiers exemples "d’ameublement et décoration totale" en collaboration avec Gio Ponti
1952 prend part à la décoration intérieure du paquebot Andrea Doria
1955-1958 création de Stanza Metafisica (la pièce métaphysique) : 32 panneaux modulables de 16 mètres de longueur totale formant un environnement architectural intérieur d’escaliers, échelles, fenêtres, portes ouvertes, perspectives. Fornasetti l’imagine comme un environnement propre à la méditation.
1970 fonde avec des amis la Galleria dei Bibliofili
1979 mort de Gio Ponti
1980 ouvre la boutique Thèmes et Variations à Londres qui donnera un nouvel intérêt son travail
1988 mort de Piero Fornasetti le 15 octobre
1989 Barnaba Fornasetti, son fils, continue le travail créatif engagé par son père
1991-1992 le Victoria and Albert Museum à Londres organise la première grande exposition dédiée à l’oeuvre de Fornasetti
1992 début d’une série de licence contractée avec des éditeurs pour une nouvelle production du travail de Fornasetti
1998 vente aux enchères par Christie's à Los Angeles
2003/2004 exposition organisée par l’Institut Italien de la Culture in USA ; exposition qui compte plus de trois pièces dont les 2/3 sont issus du travail de Piero Fornasetti et le reste de son fils Barnaba Fornasetti

 

Lien et livre

 

site internet www.fornasetti.com
 

livre sur Fornasetti  :

Fornasetti, designer de la fantaisie
de Patrick Mauriès, Edition Thames and Hudson, 1991
Rétrospective sur la production multiforme de cet artiste versatile, qui a embrassé aussi bien l'art graphique que la verrerie, la porcelaine que le tissu, la gravure que le théâtre, le mobilier que la peinture.

 

 

 

   

 

 


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