Etienne Delaune, ornemaniste de la Renaissance Maniériste (1518-1583)

par Catherine AUGUSTE
ancienne élève des Beaux-Arts de Paris
désigne et décore des cabinets de curiosités


détail d'une estampe d'Etienne Delaune
quand l'architecture rejoint la miniature

Il fut un des ornemanistes français les plus féconds du XVIe siècle : on lui attribue la paternité de plus de 400 estampes, généralement de petites tailles, dans le style maniériste de l’école de Fontainebleau.

A l’usage des orfèvres, des médailleurs ou des armuriers, les œuvres de Delaune reproduisent des modèles ornementaux mais aussi des scènes allégoriques à destination de la tapisserie ou de l’illustration. Son travail fait preuve d’une compréhension judicieuse dans l’association des formes de l’objet et des motifs ornementaux : l’armure d’Henri II en acier ciselé et doré du Metropolitan Museum dont il a exécuté les dessins vers 1555 en est un bel exemple.

 

1/ Peu de choses sur sa vie

 

Né vers 1518-1519 à Orléans ? Paris ? ou Genève ? Etienne Delaune meurt à Strasbourg (?) en 1583.

Il entre au service du roi Henri II en 1551 pour lequel il est employé comme orfèvre et graveur de médailles à la Monnaie de Paris.

Acquis à la Réforme, il quitte Paris après avoir échappé au massacre de la Saint-Barthélémy en 1572 ; il s’installe d’abord à Strasbourg puis Augsbourg où il est mentionné en 1576. Sans nul doute il poursuit la diffusion des grotesques et des rinceaux habités dans le goût bellifontain.

De 1561 à 1583 on lui attribue près de 450 estampes.

Sa dernière estampe est un portrait d’Ambroise Paré daté de 1582.

 

2/ Un répertoire ornemental maniériste

 

Rinceaux, chimères, mascarons de satyres grimaçants, arabesques, putti, guirlandes de fruits… l’œuvre de Delaune est fortement influencée par le répertoire de l’école de Fontainebleau. Elaborés par le Primatice et ses disciples, les décors du château de Fontainebleau se retrouvent alors miniaturisés par les estampes de Delaune. La dimension architecturale des ornements ainsi réduite à la taille d’estampes favorise une large diffusion de l’art raffiné maniériste dans toute l’Europe du Nord de deux façons :

- d’abord directement par les estampes largement disponibles aux corps d’artisans les plus divers,

- puis indirectement par les objets usuels (coupes, plats, etc.), l’orfèvrerie ou les armures décorés de ces mêmes motifs.

Cette transposition du monumental à l’objet de petite taille est une particularité des ornemanistes du XVIe siècle. Bien qu’inspiré des créations de Fontainebleau, l’art de Delaune se distingue de ses contemporains maniéristes par une densité rare de la composition proche de celle de Peter Flötner (1490-1546), un ornemaniste germanique. Ses œuvres « miniaturistes » se rapprochent dans une certaine mesure des marges des livres enluminés où foisonnent drôleries et rinceaux habités. Un sens du précieux et de la complexité s’y trouvent combinés de même que l’occupation de l’espace laisse peu de place au vide.

 

3/ Un ornemaniste cosmopolite

 

La gravure à l’eau-forte est née dans les ateliers d’orfèvres et d’arquebusiers où les techniques et les matériaux leur étaient déjà familiers. La plupart des ornemanistes sont issus de ce milieu et Etienne Delaune ne déroge pas à la règle puisqu’il reçut une formation de médailleur. Les orfèvres furent ainsi les premiers bénéficiaires des nouveaux modèles ornementaux.

L’autre qualité de Delaune est son cosmopolitisme qui s’exprime de plusieurs façons :

- son contact avec les œuvres des maîtres de Fontainebleau fait que son œuvre est empreinte d’Antiquité classique et de Renaissance italienne,

- la diffusion de ses estampes dans toute l’Europe, étant lui-même graveur

- son installation forcée à Strasbourg puis à Augsbourg, deux grands centres artistiques de la gravure le met en contact direct avec les artistes du Nord. Sa collaboration avec Wenzel Jamnitzer, orfèvre des empereurs, ne fait aucun doute.

Les œuvres de Delaune jouèrent un rôle important dans la diffusion du modèle bellifontain et marquèrent l’art de la grottesque dans l’Allemagne méridionale. Dans le même temps ses oeuvres s’imprègnent du goût nordique pour la densité et la vision attentive du microcosme.

 

4/ Des liens pour voir des oeuvres d'Etienne Delaune

 

Vase en forme de nef
aux armes de Lord Clinton, grand amiral d'Angleterre
Plume, encre rehaussée de bleu et de rouge à l'aquarelle, sur papier découpé, 385 x 530 mm, vers 1551
Paris, BNF

 


une des six gravures représentant les allégories des diverses sciences

Allégories des diverses sciences
Suite complète de six burins
Dimension moyenne : 8 x 5,7 cm
Dans ces gravures de petite taille, autour d'une figure en pied, apparaît tout un monde d'invention décorative dont les éléments constitués de rinceaux, d'arabesques, de chimères, de masques provoquent les rencontres les plus insolites. Ce principe de décor à grotesques, diffusé par l'estampe, devait fournir à toute l'Europe du XVIe siècle un répertoire décoratif dont la vogue atteste ce goût pour l'étrange, caractéristique de l'esthétique maniériste.
Musée des Beaux-Arts de Rennes

 

L’armure d’Henri II
Vers 1555, d’après les dessins d’Etienne Delaune
Metropolitan Museum, New York

 


détail de l'armure du Musée du Louvre d'après les dessins d'Etienne Delaune

depuis europeana
diverses œuvres attribuées à Etienne Delaune : gravures, armures, pièces d’orfèvreries, médailles

 


Les gravures d'Etienne Delaune en 2 volumes (1518-1583)
de Christophe Pollet
Atelier National de Reproduction des Thèses (1 janvier 1995)

 

Articles à consulter sur le site

 

Daniel Hopfer, graveur

Des grottesques aux grotesques

Jean Berain, un style

 

   


 

 


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