Les mauresques
par Catherine
AUGUSTE
ancienne élève
des Beaux-Arts de Paris
designe et décore des cabinets de curiosités |
Définition : Orthographiées aussi moresques, les mauresques sont un genre
ornemental emprunté à l'art islamique.
Francisque Pellerin
ornemaniste italien du XVI°
siècle, ici les feuilles sont hautement stylisées
motif peint par C.A.
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1/ Les principes de la mauresque
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Elle est composée de tiges et de feuilles liées entre elles,
sans souci naturaliste. La tige peut naître de la feuille, la
feuille peut prendre une forme fantaisiste…,
Les végétaux sont hautement stylisés et s'enroulent selon un
enchaînement rythmique,
La répétition symétrique des motifs assure une couverture
importante de l'espace.
Francisque Pellerin
la structure décorative est géométrique, les tiges naissent
des feuilles, les feuilles s'étirent
motif peint par C.A.
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2/ Le développement de la mauresque islamique
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La mauresque est un rinceau hellénistique qui a subi des
transformations : les spirales se sont multipliées, les tiges se
sont amincies et les feuilles étirées.
Répondant au principe de la non-représentation de la figure,
les mauresques se sont largement diffusées dans l'art sacré puis
profane. On les retrouve sur les reliures, les enluminures du Coran,
les carreaux de faïence…
Venise, centre important de l'imprimerie, va produire de très
nombreuses reliures ornées sur les plats des cuirs de mauresques
dorées. A la fin du XV° siècle, la ville italienne sera un lieu
d'importations massives d'objets islamiques, notamment les objets en
métal damasquiné (sur un fond recouvert de smalto noir, se
détachent mauresques et entrelacs incrustés d'or ou d'argent).
Face à ce succès, les artisans européens ne tardent pas à
s'essayer à la technique : armures de luxe, poignards, fourreaux
vont se trouver richement décorés.
La propagation du motif se fait par le biais des gravures de
"patron de broderie" autant en Italie que dans le reste de
l'Europe. Les motifs sont alors redessinés, adaptés au goût du
jour ; les rééditions se succèdent, les recueils se plagient au
XVI° siècle.
Les mauresques apparaissent sur les textiles mais aussi les
faïences, les pilastres, la voûte d'une niche, les instruments de
musique…
La stylisation très poussée des mauresques fait qu'on les
confond parfois avec les motifs stylisés des porcelaines chinoises.
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Jacques Androuet du Cerceau,
ornemaniste français du XVI° siècle,
motif peint par C.A.
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Peter Flötner
ornemaniste allemand |
Ci-dessus,
deux exemples où les mauresques
remplissent la totalité de l'espace décoratif |
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3/ Les ornemanistes, créateurs de mauresques
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Francisque Pellegrin : son
recueil Patrons de broderie façon arabique et ytalique a
été publié à Paris en 1530 et connut un vif succès. Les frises
de cet ornemaniste italien, venu travailler à la cour de François
Ier ont trouvé leur application d'abord dans la broderie puis ont
été rapidement transposées dans l'imprimerie, la reliure, la
dentelle, l'armurerie, les boiseries.
Virgil Solis : installé à Nuremberg, a dirigé un des
plus gros ateliers de motifs ornementaux. Ses premières planches
de mauresques apparaissent vers 1541 : frises, médaillons,
écoinçons pour des modèles d'orfèvrerie, de ceintures, de
fourreaux et de tables de jeux.
Peter Flötner, un des ornemanistes les plus influents en
Allemagne avec son recueil le Kunstbuch, dont certaines
planches sont communes à celles de Jacques Androuet du Cerceau. Ses compositions sont parcourues de longues tiges fines qui
s'adaptent volontiers aux panneaux d'armoire ou de meuble.
L'emploi des mauresques dans le décor sur mobilier se localise
surtout en Allemagne, Autriche et Suisse où se trouvent les plus
grands centres de marqueterie. La composition des meubles
témoigne d'une prédilection pour des ornements de remplissage où
la mauresque trouve son plein épanouissement, parfois combinée
avec des motifs de rubans…
Virgil Solis
ornemaniste allemand qui avait au XVI° siècle un des plus
gros ateliers de création et de reproduction de motifs
décoratifs à Nuremberg
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4/ Conclusion : le mélange des genres
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Vers la fin du XVI° siècle, la mauresque n'a cessé d'être
réinterprétée, redessinée et intégrée à d'autres genres
décoratifs. La simplification végétale, la multiplication des
enchevêtrements l'ont progressivement éloignée des motifs
orientaux. La mauresque tend à combler les vides dans un
fourmillement incessant et il ne reste plus qu'à la fin XVI°
siècle qu'un rinceau stylisé.
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Quelques livres
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