frise du palais du roi Assourbanipal à Ninive,
début du Ier millénaire av. J.-C.
Le lion est considéré comme le roi des
animaux terrestres. Il est une des figures allégoriques les plus fréquemment
représentées. Son aspect quasi-divin se retrouve dans les
croyances populaires : il prête ses traits aux dieux égyptiens,
dans la Bible il se couche auprès du prophète, dans les légendes
romaines il entoure Orphée… Le cabinet des félins de la grotte
de Lascaux est ornée de lions des cavernes que certains s'accordent
à rapporter à un animal de type solaire, courageux et protecteur.
Quand le Zodiaque est codifié, le lion devient un signe de feu du
milieu de l'été, exprimant l'ambition, l'orgueil, l'élévation.
Le lion est donc tout à la fois symbole de
puissance, de force, de souveraineté (il est souvent représenté
comme le gardien des portes des temples et des palais), de
magnanimité (il épargne les bêtes faibles). Il est aussi la
justice : les lions du trône de Salomon, du trône des rois de
France, des évêques à l'époque médiévale. Dans l'iconographie,
il porte le livre ou le rouleau, il devient Christ-Juge. Sa tête et
sa partie antérieure semble correspondre à la nature divine du
Christ et la partie postérieure qui contraste par sa faiblesse, à
la nature humaine.
Sous l'antiquité égyptienne, le lion vivait dans le désert là
où apparaît et disparaît le soleil, il est l'animal du feu céleste
et prête sa forme à plusieurs divinités : Atoum, dieu égyptien
associé au dieu solaire Rê, Sekhmet, déesse guerrière. Diodore
de Sicile raconte le culte des animaux sacrés en Egypte avec
surprise : on y fait la plus grande dépense pour leur entretien, on
les nourrit d'aliments particulièrement choisis, on les protège
dans des enceintes.
Au contraire de l'Egypte, la Mésopotamie donne
aux dieux une forme humaine et les animaux qui les accompagnent leur
sont soumis. Toutefois, l'animal reste un reflet de la puissance
divine : le lion ailé crachant des flammes est associé au dieu de
l'orage Adad. L'animal est souvent un génie ou plus souvent un démon
que le dieu suprême essaie de tenir en bride. L'attitude du dieu
debout sur le lion ou posant le pied dessus symbolise la puissance
divine.
En Grèce antique, le premier des travaux
d'Hercule consiste à tuer le lion de Némée, il se revêt de sa
peau pour en faire une cuirasse, la tête lui servant de casque : le
lion est une représentation de la puissance protectrice.
premier des douze travaux d'Hercule, Hercule étouffant le lion de
Némée
d'après un plat en argent du VI° siècle après J.-C.,
cabinet des médailles, Paris
Le monde animal prête souvent ses formes,
parfois hybrides, aux puissances de second-rang dont voici quelques
exemples :
-
la chimère : animal monstrueux, lion à queue de serpent
portant sur son dos la partie antérieure d'une chèvre. Selon la
tradition grecque, le roi de Lycie demande à Bellérophon de la
tuer. Celui-ci y parvint avec l'aide du cheval ailé Pégase.
-
le griffon : corps de lion ailé à la tête de rapace.
Elaboré en Egypte et Mésopotamie où il est gardien du trône
royal et guide des morts vers l'au-delà ; il sera plus tard au
service d'Apollon chez les Grecs. Le griffon traverse les siècles
avec succès, il est force et vigilance. La symbolique chrétienne
le reprend et le figure sur les monuments religieux et funéraires.
griffon, grotesques de Daniel Hopfer, Allemagne, 1527
-
le sphinx : un corps de lion, une tête humaine, généralement
assis. Sa véritable patrie est l'Egypte : le sphinx de Giseh veille
sur le royaume des morts.
Roi des animaux, feu solaire, le lion figure
donc dans l'art décoratif dès que la symbolique de la puissance
est à représenter. Plus près de nous, les exemples continuent :
-
l'héraldique offre de multiples blasons aux décors léonins.
lions entourant un cartouche tiré de grotesques de Enea Vico, XVI°
siècle
-
le mobilier Empire repose sur de nombreuses pattes de lions
et l'ornementation de la même époque se sert du modèle du sphinx
égyptien le plus souvent utilisé en double se faisant face ou dos.
le
trône de l'empereur Napoléon Ier dessiné par Percier et Fontaine,
musée des arts décoratifs, Paris
-
lions et dérivés léonins agrémentent les décors,
armoires et papiers peints utilisés en double se faisant face ou
dos (papiers peints du musée de Rixheim)
papier peint en arabesque, panneau aux Guirlandes de Fleurs
XVIII°
siècle, musée du papier peint de Rixheim
-
on le retrouve dans la ferronnerie, les poignées de vase
alors affublé d'un anneau dans la gueule.
Présent dans tous les arts décoratifs, le
lion est sans doute l'animal qui offre le plus de possibilités de
symbolique - puissance, feu, magnanimité, justice…- et de
stylisation - réaliste, grotesque, hybride, découpé (juste la tête
ou les pattes).
…et qui ne connaît pas le lion de Peugeot ou
celui rugissant des films de la Metro Goldwyn Mayer ?
(détail) Mufles de lions ornant un plat ovale, émail peint en
grisaille, Limoges, XVI° siècle
armoire type d'Uzès, avec lions, travail de Monique Maindret
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